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LETTRE DU PAPE FRANÇOIS AUX LIBANAIS À L’OCCASION DU SAINT NOËL

[…] Chers fils et filles du Liban,

ma douleur est grande de voir la souffrance et l’angoisse étouffer l’esprit d’entreprise et le dynamisme du Pays des Cèdres. Plus encore, il est douloureux de se voir voler toutes les plus chères espérances de vivre en paix et de continuer à être, pour l’histoire et pour le monde, un message de liberté et un témoignage de bien vivre ensemble ; et, moi qui, de tout cœur, prends part tant de vos joies que de vos peines, je sens au fond de l’âme la gravité de ce que vous êtes en train de perdre, surtout quand je pense aux nombreux jeunes à qui toute espérance d’un avenir meilleur est enlevée. […]

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MESSAGE VIDÉO DU SAINT-PÈRE FRANCIS AUX PARTICIPANTS À LA RÉUNION (EN LIGNE) SUR LA CRISE HUMANITAIRE SYRIENNE ET IRACHEN PROMOTIONNÉE PAR LE DICASTÈRE POUR LE SERVICE DU DÉVELOPPEMENT HUMAIN INTÉGRAL

Chers amis,

C’est avec joie que je vous adresse ce salut affectueux lors de cette rencontre
organisée par le Dicastère pour la promotion du développement humain intégral,
avec d’autres instances du Saint-Siège, pour discuter et réfléchir aux problèmes
très graves qui affligent encore les populations bien-aimées de Syrie, d’Irak et
Pays voisins.

Tout effort – petit ou grand – fait pour favoriser le processus de paix revient à
jeter une pierre dans la construction d’une société juste, ouverte à l’accueil, et
où chacun peut trouver un logement en paix. Mes pensées vont particulièrement
aux personnes qui ont dû quitter leurs maisons pour échapper aux horreurs de la
guerre, à la recherche de meilleures conditions de vie pour elles-mêmes et leurs
proches. En particulier, je me souviens des chrétiens contraints d’abandonner les
lieux où ils sont nés et ont grandi, où leur foi s’est développée et enrichie. Nous
devons faire en sorte que la présence chrétienne, sur ces terres, continue d’être
ce qu’elle a toujours été: un signe de paix, de progrès, de développement et de
réconciliation entre les individus et les peuples.

Deuxièmement, mes pensées vont aux réfugiés qui souhaitent rentrer dans leur
pays. J’appelle la communauté internationale à tout mettre en œuvre pour
encourager ce retour, en garantissant les conditions de sécurité et les conditions
économiques nécessaires pour que cela se produise. Chaque geste, chaque
effort dans ce sens est précieux.

Une dernière réflexion sur le travail des agences catholiques engagées dans
l’aide humanitaire. Une pensée d’encouragement à vous tous qui, à l’instar du
Bon Samaritain, travaillez sans réserve pour accueillir, soigner, accompagner les
migrants et les personnes déplacées sur ces terres, sans distinction de croyance
et d’appartenance. Comme je l’ai dit à plusieurs reprises, l’Église n’est pas une
ONG. Notre action caritative doit être inspirée par et par l’Évangile. Cette aide
doit être un signe tangible de la charité d’une Église locale qui vient en aide à
une autre Église qui souffre, à travers ces merveilleux moyens que sont l’aide
humanitaire catholique et les agences de développement. Une Église qui aide
une autre Église!

Pour finir, je tiens à vous faire savoir que lorsque vous vous retrouvez à opérer
dans ces lieux, vous n’êtes pas seuls! Toute l’Église devient une, pour aller à la
rencontre du blessé qui a rencontré des brigands sur le chemin de Jérusalem à
Jéricho. Dans votre travail, ma bénédiction vous accompagnera toujours, que je
vous transmets volontiers aujourd’hui, afin que cette rencontre puisse apporter
des fruits abondants de prospérité, de développement et de paix à vos pays,
pour une vie nouvelle. Merci!

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LETTRE APOSTOLIQUE PATRIS CORDE DU SAINT-PÈRE FRANÇOIS À L’OCCASION DU 150ème ANNIVERSAIRE DE LA DÉCLARATION DE SAINT JOSEPH COMME PATRON DE L’ÉGLISE UNIVERSELLE

[…] Nous savons qu’il était un humble charpentier (cf. Mt 13, 55), promis en
mariage à Marie (cf. Mt 1, 18 ; Lc 1, 27) ; un « homme juste » (Mt 1, 19),
toujours prêt à accomplir la volonté de Dieu manifestée dans sa Loi (cf. Lc 2,
22.27.39), et à travers quatre songes (cf. Mt 1, 20 ; 2, 13.19.22). Après un long
et fatiguant voyage de Nazareth à Bethléem, il vit naître le Messie dans une
étable, parce qu’ailleurs « il n’y avait pas de place pour eux » (Lc 2, 7). Il fut
témoin de l’adoration des bergers (cf. Lc 2, 8-20) et des Mages (cf. Mt 2, 1-12)
qui représentaient respectivement le peuple d’Israël et les peuples païens.

Il eut le courage d’assumer la paternité légale de Jésus à qui il donna le nom
révélé par l’ange : « Tu lui donneras le nom de Jésus, car c’est lui qui sauvera
son peuple de ses péchés » (Mt 1, 21). Comme on le sait, donner un nom à une
personne ou à une chose signifiait, chez les peuples antiques, en obtenir
l’appartenance, comme l’avait fait Adam dans le récit de la Genèse (cf. 2,
19-20). […]

[…]Quarante jours après la naissance, Joseph, avec la mère, offrit l’Enfant au
Seigneur dans le Temple et entendit, surpris, la prophétie de Siméon concernant
Jésus et Marie (cf. Lc 2, 22-35). Pour défendre Jésus d’Hérode, il séjourna en
Égypte comme un étranger (cf. Mt 2, 13-18). Revenu dans sa patrie, il vécut en
cachette dans le petit village inconnu de Nazareth en Galilée – d’où, il était dit,
« qu’il ne surgit aucun prophète » et « qu’il ne peut jamais en sortir rien de bon »
(cf. Jn 7, 52 ; 1, 46) –, loin de Bethléem, sa ville natale, et de Jérusalem où se
dressait le Temple. Quand, justement au cours d’un pèlerinage à Jérusalem, ils
perdirent Jésus âgé de douze ans, avec Marie ils le cherchèrent angoissés et le
retrouvèrent dans le Temple en train de discuter avec les docteurs de la Loi (cf.
Lc 2, 41-50).

Dans le deuxième songe, l’ange demande à Joseph : « Lève-toi ; prends l’enfant
et sa mère, et fuis en Égypte. Reste là-bas jusqu’à ce que je t’avertisse, car
Hérode va rechercher l’enfant pour le faire périr » (Mt 2, 13). Joseph n’hésite
pas à obéir, sans se poser de questions concernant les difficultés qu’il devra
rencontrer : « Il se leva dans la nuit, il prit l’enfant et sa mère et se retira en
Égypte, où il resta jusqu’à la mort d’Hérode » (Mt 2, 14-15).

En Égypte, Joseph, avec confiance et patience, attend l’avis promis par l’ange
pour retourner dans son Pays. Le messager divin, dans un troisième songe, juste
après l’avoir informé que ceux qui cherchaient à tuer l’enfant sont morts, lui
ordonne de se lever, de prendre avec lui l’enfant et sa mère et de retourner en
terre d’Israël (cf. Mt 2, 19-20). Il obéit une fois encore sans hésiter : « Il se
leva, prit l’enfant et sa mère, et il entra dans le pays d’Israël » (Mt 2, 21).

Mais durant le voyage de retour, « apprenant qu’Arkélaüs régnait sur la Judée à
la place de son père Hérode, il eut peur de s’y rendre. Averti en songe, – et c’est
la quatrième fois que cela arrive – il se retira dans la région de Galilée et vint
habiter dans une ville appelée Nazareth » (Mt 2, 22-23).

L’évangéliste Luc rapporte que Joseph a affronté le long et pénible voyage de
Nazareth à Bethléem pour se faire enregistrer dans sa ville d’origine, selon la loi
de recensement de l’empereur César Auguste. Jésus est né dans cette
circonstance (cf. Lc 2, 1-7) et il a été inscrit au registre de l’Empire comme tous
les autres enfants. […]

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DISCOURS DU PAPE FRANCOIS À DIX NOUVEAUX AMBASSADEURS NON-RÉSIDENTS A L’OCCASION DE LA PRÉSENTATION DE LEURS LETTRES DE CRÉANCE

[…] Aujourd’hui, sans doute plus que jamais, notre univers toujours plus
mondialisé exige avec urgence un dialogue et une collaboration sincères et
respectueux, capables de nous unir pour affronter les graves menaces qui
pèsent sur notre planète et compromet l’avenir des jeunes générations. Dans la
récente encyclique Fratelli tutti, j’ai exprimé le désir qu’«en cette époque que
nous traversons, en reconnaissant la dignité de chaque personne humaine, nous
puissions tous ensemble faire renaître un désir universel d’humanité» (n. 8). La
présence du Saint-Siège au sein de la communauté internationale se place au
service du bien commun mondial, en rappelant l’attention sur les aspects
anthropologiques, éthiques et religieux des diverses questions qui concernent la
vie des personnes, des peuples et de nations tout entières.

Je forme le vœu que votre activité diplomatique en tant que représentants de
vos pays près le Saint-Siège favorise la «culture de la rencontre» (Fratelli tutti,
n. 215), si nécessaire pour surmonter les différences et les divisions qui font si
souvent obstacle à la réalisation des idéaux élevés et des objectifs proposés par
la communauté internationale. En effet, chacun de nous est invité à œuvrer
chaque jour en vue de l’édification d’un monde toujours plus juste, fraternel et
uni. […]

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JOURNÉE MONDIALE DES PAUVRES MESSE HOMÉLIE DU PAPE FRANÇOIS

[…] Je voudrais remercier les nombreux fidèles serviteurs de Dieu, qui ne font
pas parler d’eux, mais qui vivent ainsi, en servant. Je pense, par exemple, à
l’abbé Roberto Malgesini. Ce prêtre ne faisait pas de théories ; simplement, il
voyait Jésus dans le pauvre et le sens de la vie dans le service. Il essuyait les
larmes avec douceur, au nom de Dieu qui console. Le début de sa journée était
la prière, pour accueillir le don de Dieu ; le centre en était la charité, pour faire
fructifier l’amour reçu ; la fin un limpide témoignage de l’Evangile. Cet homme
avait compris qu’il devait tendre la main aux nombreux pauvres qu’il rencontrait
quotidiennement, parce qu’il voyait Jésus en chacun d’eux. Frères et sœurs,
demandons la grâce de ne pas être des chrétiens seulement en paroles, mais
aussi dans les faits. Afin de porter du fruit, comme le désire Jésus. Ainsi soit-il.
[…]

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LETTRE DU PAPE FRANÇOIS SUR L’EUROPE

[…] Nous le voyons dans les nombreuses peurs qui traversent nos sociétés
d’aujourd’hui, parmi lesquelles je ne peux pas taire la méfiance à l’égard des
migrants. Seule une Europe qui est une communauté solidaire peut faire face à
ce défi de manière fructueuse, alors que toute solution partielle a déjà démontré
son insuffisance. Il est évident, en effet, que le bon accueil des migrants ne peut
pas se limiter à de simples opérations d’assistance de celui qui arrive, souvent
en échappant à des conflits, à des famines ou à des désastres naturels, mais il
doit permettre leur intégration de sorte qu’ils puissent «connaître, respecter et
assimiler aussi la culture ainsi que les traditions de la nation qui les accueille».
(Discours aux participants à la Conférence “(Re)Thinking Europe”, 28 octobre
2017) […]

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LETTRE ENCYCLIQUE FRATELLI TUTTI SUR LA FRATERNITÉ ET L’AMITIÉ SOCIALE

SANS DIGNITÉ HUMAINE AUX FRONTIÈRES

37. Aussi bien dans les milieux de certains régimes politiques populistes que sur
la base d’approches économiques libérales, on soutient que l’arrivée des
migrants doit être évitée à tout prix. Dans le même temps, on affirme que l’aide
aux pays pauvres devrait être limitée, pour qu’ils touchent le fond et décident de
prendre des mesures d’austérité. On ne se rend pas compte qu’au-delà de ces
déclarations abstraites difficiles à étayer, de nombreuses vies sont détruites.
Beaucoup de personnes échappent à la guerre, aux persécutions, aux
catastrophes naturelles. D’autres, à juste titre, «sont en quête d’opportunités
pour [elles] et pour leur famille. [Elles] rêvent d’un avenir meilleur et désirent
créer les conditions de sa réalisation» (Exhort. ap. post-syn. Christus vivit, 25
mars 2019, n. 91).

38. Malheureusement, d’autres «sont [attirées] par la culture occidentale,
nourrissant parfois des attentes irréalistes qui les exposent à de lourdes
déceptions. Des trafiquants sans scrupules, souvent liés aux cartels de la drogue
et des armes, exploitent la faiblesse des migrants qui, au long de leur parcours,
se heurtent trop souvent à la violence, à la traite des êtres humains, aux abus
psychologiques et même physiques, et à des souffrances indicibles» (Exhort. ap.
post-syn. Christus vivit, 25 mars 2019, n. 92). Ceux qui émigrent «vivent une
séparation avec leur environnement d’origine et connaissent souvent un
déracinement culturel et religieux. La fracture concerne aussi les communautés
locales, qui perdent leurs éléments les plus vigoureux et entreprenants, et les
familles, en particulier quand un parent migre, ou les deux, laissant leurs
enfants dans leur pays d’origine» (Exhort. ap. post-syn. Christus vivit, 25 mars
2019, n. 93). Par conséquent, il faut aussi «réaffirmer le droit de ne pas émigrer,
c’est-à-dire d’être en condition de demeurer sur sa propre terre» (Benoît XVI,
Message pour la 99
e Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié, 12 octobre
2012).

39. Et pour comble, «dans certains pays d’arrivée, les phénomènes migratoires
suscitent des alarmes et des peurs, souvent fomentées et exploitées à des fins
politiques. Une mentalité xénophobe de fermeture et de repli sur soi se diffuse
alors» (Exhort. ap. post-syn. Christus vivit, 25 mars 2019, n. 92). Les migrants
ne sont pas jugés assez dignes pour participer à la vie sociale comme toute
autre personne et l’on oublie qu’ils ont la même dignité intrinsèque que
quiconque. C’est pourquoi ils doivent être «protagonistes de leur propre
relèvement» (Message pour la 106
e Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié,
13 mai 2020). On ne dira jamais qu’ils ne sont pas des êtres humains, mais dans
la pratique, par les décisions et la manière de les traiter, on montre qu’ils sont
considérés comme des personnes ayant moins de valeur, moins d’importance,
dotées de moins d’humanité. Il est inacceptable que les chrétiens partagent
cette mentalité et ces attitudes, faisant parfois prévaloir certaines préférences
politiques sur les convictions profondes de leur foi: la dignité inaliénable de
chaque personne humaine indépendamment de son origine, de sa couleur ou de
sa religion, et la loi suprême de l’amour fraternel.

40. «Les migrations constitueront un élément fondamental de l’avenir du
monde» (Discours au Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège, 11
janvier 2016). Mais, de nos jours, elles doivent compter avec la «perte du ‘‘sens
de la responsabilité fraternelle’’, sur lequel est basé toute société civile»
(Discours au Corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège, 13 janvier 2014).
L’Europe, par exemple, risque fort d’emprunter ce chemin. Cependant, «aidée
par son grand patrimoine culturel et religieux, [elle] a les instruments pour
défendre la centralité de la personne humaine et pour trouver le juste équilibre
entre le double devoir moral de protéger les droits de ses propres citoyens, et
celui de garantir l’assistance et l’accueil des migrants» (Discours au Corps
diplomatique accrédité près le Saint-Siège, 11 janvier 2016).

41. Je comprends que, face aux migrants, certaines personnes aient des doutes
et éprouvent de la peur. Je considère que cela fait partie de l’instinct naturel de
légitime défense. Mais il est également vrai qu’une personne et un peuple ne
sont féconds que s’ils savent de manière créative s’ouvrir aux autres. J’invite à
dépasser ces réactions primaires, car «le problème, c’est quand [les doutes et
les craintes] conditionnent notre façon de penser et d’agir au point de nous
rendre intolérants, fermés, et peut-être même – sans nous en rendre compte –
racistes. Ainsi, la peur nous prive du désir et de la capacité de rencontrer
l’autre» (Message pour la 105
e Journée Mondiale du Migrant et du Réfugié, 27
mai 2019).

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PAPE FRANÇOIS ANGÉLUS

À l’issue de l’Angélus:
Chers frères et sœurs!
Aujourd’hui, l’Eglise célèbre la journée mondiale du migrant et du réfugié. Je
salue les réfugiés et les migrants présents sur la place autour du monument
intitulé «Anges sans le savoir» (cf. He 13, 2), que j’ai béni il y a un an. Cette
année, j’ai voulu consacrer mon message aux déplacés internes, qui sont obligés
de fuir, comme cela arriva également à Jésus et à sa famille. «Comme Jésus
obligés à fuir», c’est le cas des personnes déplacées, des migrants. C’est à eux,
de manière particulière, et à ceux qui les assistent que va notre souvenir dans la
prière. […]

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MESSAGE DU PAPE FRANÇOIS POUR LA 106 ème JOURNÉE MONDIALE DU MIGRANT ET DU RÉFUGIÉ 2020

Au commencement de l’année, dans mon discours aux membres du Corps
diplomatique accrédité près le Saint-Siège, j’ai mentionné parmi les défis du
monde contemporain le drame des personnes déplacées à l’intérieur de leur
propre pays: «Les conflits et les urgences humanitaires, aggravées par les
bouleversements climatiques, augmentent le nombre des personnes déplacées
et se répercutent sur les personnes qui vivent déjà dans un état de grande
pauvreté. Un grand nombre de pays touchés par ces situations manquent de
structures adéquates permettant de subvenir aux besoins de tous ceux qui ont
été déplacés » (9 janvier 2020).
La Section Migrants et Réfugiés du Dicastère pour le Service du Développement
Humain Intégral a publié les «Orientations pastorales sur les Déplacées
internes» (Cité du Vatican, 5 mai 2020), un document qui se propose d’inspirer
et d’animer les actions pastorales de l’Église dans ce domaine particulier.
Pour ces raisons, j’ai décidé de dédier ce Message au drame des personnes
déplacées internes, un drame souvent invisible que la crise mondiale causée par
la pandémie du COVID-19 a exacerbé. De fait, par sa véhémence, sa gravité et
son extension géographique, cette crise a redimensionné beaucoup d’autres
urgences humanitaires qui affligent des millions de personnes, reléguant
initiatives et aides internationales, essentielles et urgentes pour sauver des vies
humaines, au fin fond des agendas politiques nationaux. Or, « ce temps n’est
pas le temps de l’oubli. Que la crise que nous affrontons ne nous fasse pas
oublier tant d’autres urgences qui portent avec elles les souffrances de
nombreuses personnes» (Message Urbi et Orbi, 12 avril 2020).
À la lumière des tragiques événements qui ont marqué l’année 2020, j’étends ce
Message, dédié aux personnes déplacées internes, à tous ceux qui ont vécu et
continuent de vivre des situations de précarité, d’abandon, d’exclusion et de
rejet à cause du COVID-19.
Je voudrais partir de l’image qui inspira le Pape Pie XII à pour rédiger la
Constitution apostolique Exsul Familia (1
er août 1952). Lors de la fuite en
Égypte, l’Enfant Jésus fait l’expérience, avec ses parents, de la condition
tragique de personne déplacée et de réfugié «caractérisée par la peur,
l’incertitude, les désagréments (cf. Mt 2, 13-15.19-23). De nos jours, hélas, des
millions de familles peuvent se reconnaître dans cette triste réalité. Presque
chaque jour, la télévision et les journaux donnent des nouvelles de réfugiés qui
fuient la faim, la guerre, d’autres graves dangers, à la recherche de la sécurité
et d’une vie digne, pour eux-mêmes et pour leurs familles» (Angélus, 29
décembre 2013). En chacun d’eux, Jésus est présent, contraint de fuir pour se
sauver, comme à l’époque d’Hérode. Sur leurs visages, nous sommes appelés à
reconnaître le visage du Christ affamé, assoiffé, nu, malade, étranger et
prisonnier, qui nous interpelle (cf. Mt 25, 31-46). Si nous le reconnaissons, c’est
nous qui le remercierons d’avoir pu le rencontrer, l’aimer et le servir.
Les personnes déplacées nous offrent cette occasion de rencontre avec le
Seigneur, «même si nos yeux peinent à le reconnaître: avec les vêtements
déchirés, les pieds sales, le visage déformé, le corps blessé, incapable de parler
notre langue» (Homélie, 15 février 2019). Il s’agit d’un défi pastoral auquel nous
sommes appelés à répondre par les quatre verbes que j’ai indiqués dans le
Message de cette même Journée en 2018: accueillir, protéger, promouvoir et
intégrer. Je voudrais maintenant leur ajouter six paires de verbes qui
correspondent à des actions très concrètes, liés entre eux dans une relation de
cause à effet.
Il faut connaître pour comprendre. La connaissance est une étape nécessaire
vers la compréhension de l’autre. Jésus lui-même nous l’enseigne dans l’épisode
des disciples d’Emmaüs: «Et il advint, comme ils conversaient et discutaient
ensemble, que Jésus en personne s’approcha, et il faisait route avec eux ; mais
leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître» (Lc 24, 15-16). Quand on parle
de migrants et de personnes déplacées, trop souvent on s’arrête aux chiffres.
Mais il ne s’agit pas de chiffres, il s’agit de personnes ! Si nous les rencontrons,
nous parviendrons à les connaître. Et en connaissant leurs histoires, nous
parviendrons à comprendre. Par exemple, nous pourrons comprendre que cette
précarité dont nous avons fait l’expérience dans la souffrance à cause de la
pandémie est un élément constant de la vie des personnes déplacées.
Il est nécessaire de se rendre le prochain pour servir. Cela semble évident, mais
souvent ça ne l’est pas. «Mais un Samaritain, qui était en voyage, arriva près de
lui, le vit et fut pris de pitié. Il s’approcha, banda ses plaies, y versant de l’huile
et du vin, puis le chargea sur sa propre monture, le mena à l’hôtellerie et prit
soin de lui» (Lc 10, 33-34). Les peurs et les préjugés – beaucoup de préjugés –
nous font garder nos distances d’avec les autres et nous empêchent souvent de
«nous rendre leur prochain» pour les servir avec amour. S’approcher du prochain
signifie souvent être disposés à courir des risques, comme nous l’ont enseigné
de nombreux médecins, infirmiers et infirmières ces derniers mois. Être proche
pour servir va au-delà du pur sens du devoir ; Jésus nous en a donné l’exemple
le plus grand quand il a lavé les pieds de ses disciples: il s’est dévêtu, s’est
agenouillé et s’est sali les mains (cf. Jn 13, 1-15).
Pour se réconcilier il faut écouter. Dieu lui-même nous l’enseigne lorsque, en
envoyant son Fils dans le monde, il a voulu écouter les gémissements de
l’humanité avec des oreilles humaines: «Car Dieu a tant aimé le monde qu’il a
donné son Fils unique, […] pour que le monde soit sauvé par lui» (Jn 3, 16-17).
L’amour, celui qui réconcilie et qui sauve, commence par l’écoute. Dans le monde
d’aujourd’hui, les messages se multiplient, mais on perd l’attitude de l’écoute.
Or, ce n’est qu’à travers une écoute humble et attentive que nous pouvons
arriver à véritablement nous réconcilier. Durant l’année 2020, pendant des
semaines, le silence a régné dans nos rues. Un silence dramatique et inquiétant
qui nous a toutefois fourni l’occasion d’écouter le cri des plus vulnérables, des
personnes déplacées et de notre planète gravement malade. Et, en écoutant,
nous avons l’opportunité de nous réconcilier avec le prochain, avec beaucoup de
ceux qui sont rejetés, avec nous-mêmes et avec Dieu, qui ne se lasse jamais de
nous offrir sa miséricorde.
Pour grandir il est nécessaire de partager. Le partage a été l’un des éléments
fondateurs de la première communauté chrétienne: «La multitude des croyants
n’avait qu’un cœur et qu’une âme. Nul ne disait sien ce qui lui appartenait, mais
entre eux tout était commun» (Ac 4, 32). Dieu n’a pas voulu que les ressources
de notre planète ne profitent qu’à quelques-uns. Non, le Seigneur n’a pas voulu
cela! Nous devons apprendre à partager pour grandir ensemble, sans laisser
personne de côté. La pandémie nous a rappelé que nous sommes tous dans le
même bateau. Nous retrouver avec des préoccupations et des craintes
communes nous a démontré, une fois encore, que personne ne peut s’en sortir
tout seul. Pour grandir vraiment, nous devons grandir ensemble, en partageant
ce que nous avons, comme ce garçon qui offrit à Jésus cinq pains d’orge et deux
poissons… Et il y en eut assez pour cinq mille personnes (cf. Jn 6, 1-15)!
Il faut impliquer pour promouvoir. C’est ce que Jésus a fait avec la Samaritaine
(cf. Jn 4, 1-30). Le Seigneur s’approche d’elle, il l’écoute, parle à son cœur pour
ensuite la guider vers la vérité et la transformer en annonciatrice de la bonne
nouvelle: «Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-il pas
le Christ?» (v. 29). Parfois, l’élan pour servir les autres nous empêche de voir
leurs richesses. Si nous voulons vraiment promouvoir les personnes auxquelles
nous offrons assistance, nous devons les impliquer et les rendre protagonistes
de leur propre relèvement. La pandémie nous a rappelé combien la
coresponsabilité est essentielle et que ce n’est qu’avec la contribution de tous –
même des catégories souvent sous-évaluées – qu’il est possible d’affronter la
crise. Nous devons «trouver le courage d’ouvrir des espaces où tous peuvent se
sentir appelés, et permettre de nouvelles formes d’hospitalité et de fraternité
ainsi que de solidarité» (Méditation, place Saint-Pierre, 27 mars 2020).
Il est nécessaire de collaborer pour construire. C’est ce que l’Apôtre Paul
recommande à la communauté de Corinthe: «Je vous en prie, frères, par le nom
de notre Seigneur Jésus-Christ, ayez tous même langage; qu’il n’y ait point
parmi vous de divisions ; soyez étroitement unis dans le même esprit et dans la
même pensée» (1 Co 1, 10). Construire le Royaume de Dieu est un engagement
commun à tous les chrétiens et c’est pourquoi il est nécessaire que nous
apprenions à collaborer, sans nous laisser tenter par les jalousies, les discordes
et les divisions. Et, dans le contexte actuel, il faut réaffirmer: «Ce temps n’est
pas le temps des égoïsmes, parce que le défi que nous affrontons nous unit tous
et ne fait pas de différence entre les personnes» (Message Urbi et Orbi, 12 avril
2020). Pour préserver la maison commune et faire en sorte qu’elle ressemble
toujours davantage au projet originel de Dieu, nous devons nous efforcer de
garantir la coopération internationale, la solidarité globale et l’engagement local,
sans laisser personne en dehors.
Je voudrais conclure par une prière suggérée par l’exemple de saint Joseph, en
particulier lorsqu’il fut contraint de fuir en Égypte pour sauver l’Enfant.
Père, tu as confié à saint Joseph ce que tu avais de plus précieux : l’Enfant Jésus
et sa mère, pour les protéger des dangers et des menaces des mauvais.
Accorde-nous aussi de ressentir sa protection et son aide. Lui qui a éprouvé la
souffrance de ceux qui fuient à cause de la haine des puissants, fais qu’il puisse
réconforter et protéger tous ces frères et sœurs qui, poussés par les guerres, la
pauvreté et les nécessités, quittent leur maison et leur terre pour se mettre en
chemin et chercher refuge vers des lieux plus sûrs.
Aide-les, par son intercession, à avoir la force d’aller de l’avant, le réconfort
dans la tristesse, le courage dans l’épreuve.
Donne à ceux qui les accueillent un peu de la tendresse de ce père juste et sage,
qui a aimé Jésus comme un véritable fils et qui a soutenu Marie tout au long du
chemin.
Lui, qui gagnait son pain par le travail de ses mains, puisse-t-il pourvoir aux
besoins de ceux à qui la vie a tout pris, et leur donner la dignité d’un travail et la
sérénité d’une maison.
Nous te le demandons par Jésus Christ, ton Fils, que saint Joseph sauva en
fuyant en Égypte, et par l’intercession de la Vierge Marie, qu’il aima en époux
fidèle, selon ta volonté. Amen.
Rome, Saint-Jean-de-Latran, 13 mai 2020,
Mémoire de Notre-Dame de Fatima

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PAPE FRANÇOIS AUDIENCE GÉNÉRALE

[…] Si l’on veut dire cela avec le langage des personnes communes: on écoute
davantage les puissants que les faibles et ce n’est pas le chemin, ce n’est pas le
chemin humain, ce n’est pas le chemin que nous a enseigné Jésus, ce n’est pas
mettre en œuvre le principe de subsidiarité. Ainsi, on ne permet pas aux
personnes d’être les «protagonistes de leur propre relèvement». (Message pour
la 106e journée mondiale du migrant et du réfugié 2020, 13 mai 2020). Dans
l’inconscient collectif de certains hommes politiques ou de certains syndicalistes
il y a cette devise: tout pour le peuple, rien avec le peuple. […]