Chers frères et sœurs, bonjour !
Je suis heureux de vous rencontrer dans le cadre de votre congrès international.
Merci, madame la présidente, pour vos aimables paroles — et claires, comme
vous le faites toujours, claires —. En ces jours, vous avez traité de thèmes
importants et essentiels: la solidarité, la coopération et la responsabilité comme
antidotes à l’injustice, à l’inégalité et à l’exclusion.
Ce sont des réflexions importantes, à une époque où les incertitudes et la
précarité qui marquent l’existence de tant de personnes et de communautés
sont aggravées par un système économique qui continue d’écarter des vies au
nom du dieu argent, en inculquant des attitudes rapaces envers les ressources
de la Terre et en alimentant de nombreuses formes d’iniquité. Face à cela, nous
ne pouvons pas rester indifférents. Mais la réponse aux injustices et à
l’exploitation n’est pas seulement la dénonciation; c’est avant tout la promotion
active du bien: dénoncer le mal mais promouvoir le bien. Et pour cela je vous
exprime ma reconnaissance: pour les activités que vous menez, notamment
dans le domaine de l’éducation et de la formation, en particulier pour
l’engagement à financer des études et des recherches pour les jeunes sur de
nouveaux modèles de développement économique et social inspirés de la
doctrine sociale de l’Eglise. C’est important, nous en avons besoin: sur le terrain
pollué par la domination de la finance nous avons besoin de nombreuses petites
graines qui fassent germer une économie équitable et bénéfique, à taille
humaine et digne de l’homme. Nous avons besoin de possibilités qui deviennent
réalité, de réalités qui donnent de l’espérance. Voilà ce que signifie mettre en
pratique la doctrine sociale de l’Eglise. […]
[…] Les trois mots que vous avez choisis — solidarité, coopération et
responsabilité — représentent précisément trois piliers de la doctrine sociale de
l’Eglise, qui considère la personne humaine, naturellement ouverte aux relations,
comme le sommet de la création et le centre de l’action sociale, économique et
politique. Avec ce regard attentif à l’être humain et sensible au caractère concret
des dynamiques historiques, la doctrine sociale contribue à une vision du monde
qui s’oppose à celle individualiste, dans la mesure où elle se fonde sur
l’interconnexion entre les personnes et a comme fin le bien commun. Et en
même temps elle s’oppose à la vision collectiviste, qui resurgit aujourd’hui dans
une nouvelle version, cachée dans les projets d’homologation technocratique.
Mais il ne s’agit pas d’une «affaire politique»: la doctrine sociale est ancrée dans
la Parole de Dieu, pour orienter les processus de promotion humaine à partir de
la foi en Dieu fait homme. C’est pourquoi on doit la suivre, l’aimer et la
développer: passionnons-nous à nouveau à la doctrine sociale, faisons-la
connaître car c’est un trésor de la tradition ecclésiale! C’est précisément en
l’étudiant que vous aussi, vous vous êtes sentis appelés à vous engager contre
les inégalités, qui blessent particulièrement les plus fragiles, et à œuvrer pour
une fraternité réelle et effective.
Solidarité, coopération, responsabilité: trois mots que vous posez ces jours-ci
comme centres de vos ré-flexions et qui rappellent le mystère même de Dieu,
qui est la Trinité. Dieu est communion de personnes et nous oriente à nous
réaliser grâce à une ouverture généreuse aux autres (solidarité), à travers la
collaboration avec les autres (coopération), à travers l’engagement pour les
autres (responsabilité). Et à le faire dans toutes les expressions de la vie sociale,
à travers les relations, le travail, l’engagement civique, le rapport à la création,
la politique: dans tous les domaines, nous sommes, aujourd’hui plus que jamais,
obligés de témoigner de l’attention pour les autres, de sortir de nous-mêmes, de
nous engager gratuitement dans le développement d’une société plus juste et
plus équitable, où l’égoïsme et les intérêts partisans ne prévalent pas. Et dans le
même temps, nous sommes appelés à veiller au respect de la personne
humaine, à sa liberté, à la protection de sa dignité inviolable. D’où la mission de
mettre en œuvre la doctrine sociale de l’Eglise.
Chers amis, en promouvant ces valeurs et ce style de vie — nous le savons — on
va souvent à contre-courant, mais — souvenons-nous en toujours — nous ne
sommes pas seuls. Dieu s’est fait proche de nous. Non pas en paroles, mais par
sa présence: en Jésus, Dieu s’est incarné. Et avec Jésus, qui est devenu notre
frère, nous reconnaissons en tout homme un frère, en chaque femme une sœur.
Animés par cette communion universelle, en tant que communauté -croyante,
nous pouvons collaborer sans crainte avec chacun pour le bien de tous: sans
fermetures, sans visions d’exclusion, sans préjugés. En tant que chrétiens, nous
sommes appelés à un amour sans frontières et sans limites, signe et témoignage
que l’on peut dépasser les murs de l’égoïsme et des intérêts personnels et
nationaux; au-delà du pouvoir de l’argent qui décide souvent des causes des
peuples; au-delà des barrières des idéologies, qui divisent et amplifient les
haines; au-delà de toute barrière historique et culturelle et, surtout, au-delà de
l’indifférence, cette culture de l’indifférence qui, malheureusement, est
quotidienne. Nous pouvons être tous frères, et donc nous pouvons et devons
penser et travailler comme frères de tous. Cela peut sembler une utopie
irréalisable. Nous préférons en revanche penser que c’est un rêve possible, car
c’est le rêve même du Dieu un et trine. Avec son aide, c’est un rêve qui peut
commencer à se réaliser aussi dans ce monde.
C’est donc une grande tâche que de construire un monde plus solidaire, plus
juste et plus équitable. Pour un croyant, ce n’est pas quelque chose de pratique
détaché de la doctrine, mais c’est donner corps à la foi, à la louange de Dieu,
amoureux de l’homme, amoureux de la vie. Oui, chers frères et sœurs, le bien
que vous faites à chaque homme sur terre réjouit le cœur de Dieu au ciel.
Continuez votre chemin avec courage. Je vous accompagne de ma prière et je
vous bénis vous et votre engagement. Et s’il vous plaît, n’oubliez pas de prier
pour moi. Merci.